Les changements apportés par la loi du 12 mai 2025 sur l’accès à la nationalité française à Mayotte

Promulguée le 12 mai 2025 et publiée au Journal officiel le lendemain, une nouvelle loi durcit les conditions d’accès à la nationalité française. Désormais, les enfants nés sur le sol français ne pourront acquérir la nationalité que si leurs parents justifient d’un séjour d’au moins 3 ans dans l’Hexagone. Le droit du sol à Mayotte avant l’adoption de la loi du 12 mai 2025 Le droit du sol à Mayotte octroyait la nationalité française de plein droit aux personnes nées sur le territoire à leur majorité. Ces individus avaient également la possibilité de revendiquer ce statut dès l’âge de 13 ou de 16 ans s’ils justifient d’une résidence continue ou habituelle en France pendant au moins 5 ans. Instaurée pour une meilleure maîtrise du flux migratoire, la loi du 10 septembre 2018 ajoute à ces exigences une condition supplémentaire. Au moment de la naissance de l’enfant, l’un des deux parents devait avoir déjà résidé en France durant un an minimum. Les grandes lignes de la nouvelle loi La nouvelle loi modifiant en profondeur les règles liées au droit du sol à Mayotte a été examinée par l’Assemblée nationale le 3 décembre 2024 et adoptée le 12 mai 2025. Désormais, un enfant de parents étrangers né à Mayotte ne pourra devenir Français que si, à sa naissance, ses deux parents justifient d’une résidence régulière de 3 ans minimum en France. Pour que la demande de nationalité de l’enfant soit valide, l’amendement porté par la députée Estelle Youssouffa impose : Les enjeux de la loi du 12 mai 2025 Cette nouvelle loi, validée par le Conseil constitutionnel le 7 mai 2025, vise à rendre Mayotte moins attractive aux yeux des étrangers, car l’immigration massive se révèle comme une véritable problématique sur le territoire. Même si les demandes de nationalité française ont baissé de 72 % à cause de la loi du 10 septembre 2018, la pression migratoire persiste à Mayotte. En 2020, les ressortissants étrangers en séjour irrégulier interpellés à terre étaient au nombre de 13 608. Ce chiffre a doublé en 2023 d’après le rapport du préfet du département de Mayotte. Deux principaux courants migratoires ont été identifiés : En 2025, l’île compte 160 000 ressortissants étrangers, dont 80 000 sans-papiers pour une population totale de 320 000 habitants. Les services publics à bout de souffle face à l’arrivée continue de migrants L’arrivée continue de ressortissants étrangers met à mal les services publics qui se trouvent dans l’incapacité de satisfaire toutes les demandes. Cette situation se ressent particulièrement dans les écoles qui ne peuvent plus recevoir de nouveaux élèves, obligeant la mise en place d’un système de rotation. L’accès à l’eau potable est également mis à rude épreuve, car les infrastructures sont incapables de répondre à la hausse constante des besoins de la population. L’insécurité grandissante de l’île et la santé publique en danger Selon la commission des lois du Sénat, l’immigration irrégulière joue un rôle important dans la montée de l’insécurité et des actes de délinquance à Mayotte. Près de 60 % de la population locale ne se sentiraient pas en sécurité sur l’île. Au cours de l’année 2024, 10 968 infractions ont été recensées à Mayotte, incluant : Par ailleurs, le rapport du Sénat enregistré à la Présidence le 19 mars 2025 note que l’immigration constitue un risque pour la santé publique. Beaucoup d’enfants d’étrangers en situation irrégulière ne sont pas vaccinés, ce qui peut entraîner la résurgence de maladies graves déjà disparues. Des avis mitigés… La nouvelle loi concernant le droit du sol à Mayotte suscite autant d’espoirs que de controverses. Si la commission des lois l’a accueilli de manière positive, elle estime toutefois certaines mesures comme étant disproportionnées. Pour la professeure de droit public Anne Levade, la durée de séjour de 3 ans pour les parents étrangers d’enfants nés à Mayotte est excessive. Elle propose de la réduire à un an. La commission souhaite également supprimer l’obligation des deux parents à fournir un passeport biométrique qu’elle considère en contradiction aux exigences constitutionnelles. Elle remet aussi en question l’exigence de résidence régulière des parents en France. Pour celle-ci, cette mesure risque d’accroître le nombre des reconnaissances frauduleuses de paternité. Par exemple, une mère en situation régulière pourrait demander à un Français ou à une personne en séjour régulier de reconnaître son enfant bien qu’il ne soit pas le père. Pour la juriste et journaliste française Claire Hédon, cette condition viole les droits de l’enfant tels que définit la Convention internationale des droits de l’enfant. Elle souligne également le risque d’exclusion des enfants de familles séparées ou monoparentales que va causer cette mesure. Enfin, elle évoque les difficultés relatives à la fourniture de documents justifiant la résidence régulière des parents, en raison des dysfonctionnements des services préfectoraux à Mayotte, qui freinent l’obtention de titre de séjour.