La loi immigration du 26 janvier 2024 constitue une étape majeure dans l’évolution de la politique migratoire française. Entre durcissement des conditions d’entrée et volonté d’intégration, elle suscite autant d’espoirs que d’inquiétude.
Adoptée le 26 janvier 2024, la loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » a provoqué une onde de choc auprès des ressortissants étrangers résidant en France. Portée par le gouvernement puis remaniée après son passage au Sénat, elle englobe plus de 80 articles qui redessinent le droit des étrangers sur le territoire. Décryptage des points essentiels.
La régularisation par le travail à titre « strictement exceptionnel »
Le plus gros changement de la nouvelle loi asile et immigration concerne la régularisation par le travail.
Les changements pour les travailleurs sans papiers
La loi du 26 janvier 2024 renforce le caractère strictement exceptionnel de l’admission au séjour des travailleurs sans-papiers dans des métiers en tension, à l’instar du BTP, de l’aide à domicile, de la restauration et autres. Désormais, 3 ans de résidence ininterrompue en France et une activité professionnelle d’au moins 12 mois sur les 2 dernières années sont exigés pour obtenir une carte de séjour travailleur temporaire ou salarié.
Tout étranger ne remplissant pas ces critères se verront recevoir un refus assorti d’une OQTF.
Par ailleurs, une carte de séjour pluriannuelle intitulée « talent – profession médicale et de la pharmacie » est créée afin de satisfaire aux besoins de recrutement des hôpitaux et des structures médico-sociales. D’une validité de 4 ans, elle est accordée aux dentistes, sages-femmes, médecins ou pharmaciens praticiens diplômés hors UE.
Les changements pour les employeurs de sans-papiers
Du côté des employeurs, toute demande d’autorisation de travail sera refusée en cas de condamnation pénale ou sanctions administratives pour faux et usage de faux, atteinte à la personne humaine, aide à l’entrée et au séjour irrégulier sur le sol français.
Tout individu désireux d’obtenir une autorisation aux pouvoirs publics est également tenu de fournir un justificatif attestant de conditions de vie décentes du travailleur.
Par ailleurs, la loi immigration impose une amende administrative de 20 750 euros par salarié aux employeurs en cas d’emploi ou de conservation ;
- d’un travailleur étranger sans titre de séjour et non autorisé à exercer en tant que salarié en France,
- d’un travailleur étranger dont la profession, la catégorie ou la zone géographique ne correspond pas à celles mentionnées dans sa carte de séjour.
Cette amende se substitue aux contributions spéciale et forfaitaire auparavant versées par l’OFII. Son montant est réduit à 8 300 euros si l’employeur a réglé l’intégralité des indemnités et des salaires dus au travailleur en situation irrégulière.
La somme doit être versée sur un compte créé par l’OFII au nom du ressortissant étranger concerné dans un délai de 15 jours maximum.
La délivrance du titre de séjour conditionnée par le respect des principes républicains
L’article 46 de la loi immigration du 26 janvier 2025 est claire sur le sujet. Les ressortissants souhaitant demander ou renouveler leur carte de séjour sont tenus de signer le contrat d’engagement portant sur le respect des principes républicains.
En plus de la liberté personnelle, d’expression et de conscience, ce document impose notamment le respect :
- de l’égalité entre les sexes,
- de la dignité humaine,
- du principe de laïcité,
- ainsi que des symboles et de la devise de la République.
Ainsi, un étranger, même s’il remplit toutes les conditions exigées à l’obtention de ce sésame, verra sa demande refusée s’il n’adhère pas à ces valeurs.
Intensification des procédures d’éloignement
Il faut savoir que la loi immigration du 26 janvier 2024 est née d’un compromis entre exigences sécuritaires et impératifs d’intégration. Simplifier l’éloignement des ressortissants étrangers susceptibles de constituer une menace pour l’ordre public figure parmi ses objectifs principaux.
Ainsi, les étrangers réguliers condamnés pour des crimes ou délits passibles de 3 à 5 ans de prison peuvent être expulsés même s’ils ont des attaches personnelles ou résident en France depuis longtemps. Il en va de même pour les individus impliqués dans des violences contre des élus ou des agents publics.
Les protections accordées aux étrangers irréguliers arrivés en France avant l’âge de 13 ans ou époux de Français sont également supprimées et remplacées par une OQTF.
Par ailleurs, les demandeurs d’asile, s’ils constituent une menace pour l’ordre public, pourront être assignés à résidence pendant une durée de 3 ans maximum.
Bien entendu, l’application de cette mesure s’appuie sur la considération de leur état de vulnérabilité : mineur, femme enceinte, etc. Il en va de même pour les victimes de tortures, de viols et autres formes graves de violence sexuelle, physique ou psychologique.
Plusieurs mesures de la loi immigration censurées par le Conseil constitutionnel
Trente-deux articles de la loi immigration ont été jugés « cavaliers législatifs » et censurés par la Cour Constitutionnel. Parmi ces dispositions, on note :
- les restrictions sur l’accès au séjour des ressortissants étrangers malades,
- les conditions d’hébergement d’urgence des ressortissants sous OQTF,
- l’exigence d’une durée de séjour régulier aux individus de nationalité étrangère pour l’accès aux aides personnelles au logement, aux allocations familiales et autres allocations,
- et l’enregistrement d’empreintes digitales de clandestins sans consentement.
Il est aussi utile de noter que le Sénat a transformé l’aide médicale d’État en une aide médicale d’urgence. Cela dit, cette décision ne figure pas dans le texte approuvé par le Parlement, car la commission mixte paritaire l’a supprimé.