Instaurée pour abroger la circulaire Valls, la circulaire Retailleau revoit et renforce les conditions de régularisation par admission exceptionnelle au séjour dit AES. Depuis sa diffusion en janvier 2025, cette circulaire a provoqué une onde de choc auprès des ressortissants, d’associations défendant les droits des étrangers et d’employeurs dans le secteur des métiers en tension. Mais de quoi s’agit-il au juste et qu’est-ce que cela implique ? Focus. En quoi la circulaire Retailleau se distingue de celle de Valls ? Adressée aux préfets et signée par le ministre de l’Intérieur, la circulaire Retailleau met fin aux orientations pour l’AES de la circulaire Valls diffusée le 28 novembre 2012. Si cette dernière promouvait une politique d’immigration lucide et équilibrée, ce nouveau texte de 3 pages vise une meilleure maîtrise du flux migratoire. Elle appuie et impose le respect de la loi sur l’immigration de janvier 2024. Ainsi, les conditions d’accès à la régularisation ont été durcies, tant sur la durée de présence en France que sur le niveau d’intégration dans la société. Application stricte du droit commun pour les régularisations fondées sur la vie privée et familiale La nouvelle circulaire impose aux préfets de s’appuyer sur le droit commun et d’appliquer les critères légaux pour toute délivrance de titre de séjour aux : Hors de ces cadres, les régularisations doivent être justifiées d’un caractère exceptionnel ou des situations humanitaires. Circulaire Retailleau : un tour de vis pour la régularisation par AES La circulaire Retailleau instaure 3 dispositions soulignant le caractère « strictement exceptionnel » de régularisation pour les sans-papiers établis en France. Intensification des conditions d’AES Cette nouvelle feuille de route du ministre de l’Intérieur impose désormais aux travailleurs en situation irrégulière une résidence ininterrompue de 3 ans sur le territoire français. Elle exige aussi 12 mois d’activité professionnelle consécutifs ou non dans un métier en tension sur les 2 dernières années. En revanche, pour les autres motifs, justifier de 7 ans de présence ininterrompue en France, au lieu des 5 exigés par la circulaire Valls, est obligatoire pour espérer une régularisation. Renforcement des critères d’intégration La circulaire impose la signature d’un contrat d’engagement au respect des principes républicains, à joindre à toute demande ou renouvellement de titre de séjour. Soucieux de l’intégration des ressortissants étrangers à la société française, le ministre de l’Intérieur demande également aux concernés un diplôme ou une certification linguistique délivré par un organisme agréé. Ce document doit justifier une maîtrise de la langue “appréciée de manière favorable”. Systématisation d’OQTF en cas de refus Selon la circulaire Retailleau, tout ressortissant étranger en quête de régularisation verra leur demande refusée s’il n’a pas respecté une OQTF ou une IRTF. Il en va de même pour les sans-papiers constituant une menace pour l’ordre public et vivant en polygamie. Bruno Retailleau demande également aux préfets de joindre à tout refus de séjour une Obligation de Quitter le Territoire dont la durée d’exécution est désormais portée à 3 années au lieu d’une. Cela dit, il s’en remet au pouvoir du préfet d’apprécier la situation individuelle de l’étranger pour prendre une décision concernant ce dernier. Les associations dénoncent… Les réactions des associations défendant les droits des étrangers ne se sont pas fait attendre depuis la diffusion de la circulaire Retailleau. Rappelant les 34 724 titres de séjour délivrés et recensés par le ministère de l’Intérieur en 2023, la Cimade souligne les régularisations déjà au compte-goutte du temps de la circulaire du Valls. Pour celle-ci, vivre 7 ans en France sans stabilité administrative constitue, pour les étrangers, un frein pour s’intégrer pleinement à la société. L’association renouvelle son engagement auprès des personnes étrangères confrontées à la précarité. Pour celle-ci, la seule manière d’y remédier est l’inscription d’une régularisation vaste et pérenne dans la loi. Que faire pour maximiser ses chances de régularisation ? Même si la circulaire Retailleau complexifie l’évaluation des dossiers au niveau préfectoral, elle ne modifie pas les principes appliqués par les tribunaux. Pour l’analyse de chaque cas, ces derniers se basent toujours sur la jurisprudence actuelle et les règles mentionnées dans le CESEDA dit Code de l’entrée et du séjour et du droit d’asile. Ainsi, une demande de régularisation bien préparée et rigoureusement constituée est essentielle pour avoir une chance d’obtenir un titre de séjour. Le dossier, déposé dans les délais, doit être à la fois complet et convaincant, en apportant des éléments probants sur : Ici, solliciter l’expertise d’un avocat spécialisé en droit des étrangers est crucial pour sécuriser le dossier et anticiper les obstacles. Experts dans le domaine, nous nous tenons à vos côtés et vous assistons tout au long de la procédure. De l’analyse de votre situation à la constitution du dossier, en passant par la rédaction des courriers et la représentation en cas de recours, notre accompagnement vise à optimiser chaque étape. Notre connaissance approfondie du CESEDA et des nouvelles réglementations en vigueur nous permettent d’optimiser vos chances de succès. Dans un contexte de plus en plus restrictif, être bien conseillé n’est pas un atout, mais une nécessité.
Loi du 26 janvier 2024 : Quelles conséquences pour les étrangers en France ?
La loi immigration du 26 janvier 2024 constitue une étape majeure dans l’évolution de la politique migratoire française. Entre durcissement des conditions d’entrée et volonté d’intégration, elle suscite autant d’espoirs que d’inquiétude. Adoptée le 26 janvier 2024, la loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » a provoqué une onde de choc auprès des ressortissants étrangers résidant en France. Portée par le gouvernement puis remaniée après son passage au Sénat, elle englobe plus de 80 articles qui redessinent le droit des étrangers sur le territoire. Décryptage des points essentiels. La régularisation par le travail à titre « strictement exceptionnel » Le plus gros changement de la nouvelle loi asile et immigration concerne la régularisation par le travail. Les changements pour les travailleurs sans papiers La loi du 26 janvier 2024 renforce le caractère strictement exceptionnel de l’admission au séjour des travailleurs sans-papiers dans des métiers en tension, à l’instar du BTP, de l’aide à domicile, de la restauration et autres. Désormais, 3 ans de résidence ininterrompue en France et une activité professionnelle d’au moins 12 mois sur les 2 dernières années sont exigés pour obtenir une carte de séjour travailleur temporaire ou salarié. Tout étranger ne remplissant pas ces critères se verront recevoir un refus assorti d’une OQTF. Par ailleurs, une carte de séjour pluriannuelle intitulée « talent – profession médicale et de la pharmacie » est créée afin de satisfaire aux besoins de recrutement des hôpitaux et des structures médico-sociales. D’une validité de 4 ans, elle est accordée aux dentistes, sages-femmes, médecins ou pharmaciens praticiens diplômés hors UE. Les changements pour les employeurs de sans-papiers Du côté des employeurs, toute demande d’autorisation de travail sera refusée en cas de condamnation pénale ou sanctions administratives pour faux et usage de faux, atteinte à la personne humaine, aide à l’entrée et au séjour irrégulier sur le sol français. Tout individu désireux d’obtenir une autorisation aux pouvoirs publics est également tenu de fournir un justificatif attestant de conditions de vie décentes du travailleur. Par ailleurs, la loi immigration impose une amende administrative de 20 750 euros par salarié aux employeurs en cas d’emploi ou de conservation ; Cette amende se substitue aux contributions spéciale et forfaitaire auparavant versées par l’OFII. Son montant est réduit à 8 300 euros si l’employeur a réglé l’intégralité des indemnités et des salaires dus au travailleur en situation irrégulière. La somme doit être versée sur un compte créé par l’OFII au nom du ressortissant étranger concerné dans un délai de 15 jours maximum. La délivrance du titre de séjour conditionnée par le respect des principes républicains L’article 46 de la loi immigration du 26 janvier 2025 est claire sur le sujet. Les ressortissants souhaitant demander ou renouveler leur carte de séjour sont tenus de signer le contrat d’engagement portant sur le respect des principes républicains. En plus de la liberté personnelle, d’expression et de conscience, ce document impose notamment le respect : Ainsi, un étranger, même s’il remplit toutes les conditions exigées à l’obtention de ce sésame, verra sa demande refusée s’il n’adhère pas à ces valeurs. Intensification des procédures d’éloignement Il faut savoir que la loi immigration du 26 janvier 2024 est née d’un compromis entre exigences sécuritaires et impératifs d’intégration. Simplifier l’éloignement des ressortissants étrangers susceptibles de constituer une menace pour l’ordre public figure parmi ses objectifs principaux. Ainsi, les étrangers réguliers condamnés pour des crimes ou délits passibles de 3 à 5 ans de prison peuvent être expulsés même s’ils ont des attaches personnelles ou résident en France depuis longtemps. Il en va de même pour les individus impliqués dans des violences contre des élus ou des agents publics. Les protections accordées aux étrangers irréguliers arrivés en France avant l’âge de 13 ans ou époux de Français sont également supprimées et remplacées par une OQTF. Par ailleurs, les demandeurs d’asile, s’ils constituent une menace pour l’ordre public, pourront être assignés à résidence pendant une durée de 3 ans maximum. Bien entendu, l’application de cette mesure s’appuie sur la considération de leur état de vulnérabilité : mineur, femme enceinte, etc. Il en va de même pour les victimes de tortures, de viols et autres formes graves de violence sexuelle, physique ou psychologique. Plusieurs mesures de la loi immigration censurées par le Conseil constitutionnel Trente-deux articles de la loi immigration ont été jugés « cavaliers législatifs » et censurés par la Cour Constitutionnel. Parmi ces dispositions, on note : Il est aussi utile de noter que le Sénat a transformé l’aide médicale d’État en une aide médicale d’urgence. Cela dit, cette décision ne figure pas dans le texte approuvé par le Parlement, car la commission mixte paritaire l’a supprimé.