Coup de rabot sur l’AME : vers un accès aux soins “à la carte” pour les sans-papiers ?

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À seulement quelques jours avant le fameux vote de confiance sollicité par François Bayrou à l’Assemblée nationale, le gouvernement présente son projet de revoir les conditions d’accès à l’aide médicale d’État et de diminuer les soins de santé accordés aux sans-papiers. Une “mesure de justice” qui a scandalisé les ONG de santé.

Accès à l’aide médicale d’État : une pièce d’identité valide avec photo exigée

Mardi 02 septembre 2025, le gouvernement soumet pour avis au conseil de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) deux décrets portant sur l’accès à l’aide médicale d’État. 

L’un de ces textes modifie les pièces justificatives requises pour obtenir l’AME. Jusqu’ici, un passeport, un ancien titre de séjour, une carte d’identité, un livret de famille ou même un simple extrait d’acte de naissance suffisaient pour monter un dossier. Selon le ministère de la Santé, le gouvernement impose désormais la présentation d’un document d’identité en cours de validité comportant une photo. 

À cela s’ajoute la prise en compte des ressources financières des membres du foyer. Autrement dit, les revenus de la personne demandeuse ne seront plus les seuls à être évalués lors de l’appréciation de son dossier, ceux de son/sa conjoint-(e) entreront aussi dans le calcul. Offusquée par cette mesure, l’ONG Médecins du monde dénonce un possible accroissement des situations d’emprise et de dépendance conjugales de 40 000 femmes en situation précaire.

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Exclusion de certains actes médicaux

L’autre décret soumis aux instances de la CNAM porte exclusivement sur les soins pris en charge par l’AME. À titre de rappel, l’aide médicale d’État offre aux ressortissants étrangers en séjour irrégulier et ayant de très faibles revenus de profiter d’une couverture intégrale de leurs soins médicaux. Un temps révolu puisque le gouvernement entend réduire la liste des soins inclus dans le panier. 

Il y expose notamment son souhait d’y exclure la balnéothérapie ainsi que des actes médicaux destinés à la prévention d’une maladie ou ne nécessitant pas un traitement urgent pour les individus majeurs. 

Selon le média français Sud Ouest, on compte notamment : 

  • les lunettes,
  • les soins prothétiques dentaires, 
  • certains actes de masso-kinésithérapie
  • ainsi que les transports sanitaires pour des soins programmés et non urgents en ville. 

Une “mesure de bon sens” selon François Bayrou

Pour information, l’aide médicale d’État représentait 1,5 milliard d’euros en 2024. Ce chiffre équivaut à près de 0,5% des dépenses de santé du budget du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Si le dispositif se trouve aujourd’hui dans la ligne de mire de l’extrême droite et la droite qui souhaitent le remplacer par une “aide médicale d’urgence”, le monde de la santé la défend farouchement, évoquant un enjeu majeur de la santé publique. 

Pour sa défense, François Bayrou estime que ce durcissement est simplement “une mesure de bon sens”. “Lorsque vous demandez des efforts aux Français, il n’est pas possible qu’ils aient le sentiment de devoir faire des efforts, mais pas les autres… Ce n’est pas possible que les étrangers que nous accueillons et que nous aidons ne soient pas associés à cet effort” a-t-il déclaré au micro de BFMTV. 

Le ministère de la Santé, quant à lui, souligne que ces dispositions ne remettent pas en cause l’AME. Ce sont simplement des ajustements conformes aux recommandations du rapport Evin-Stefanini commandé à l’ancien ministre socialiste de la Santé Claude Evin et à l’ancien préfet Patrick Stefanini, spécialiste de l’immigration. “Rien n’est blanc, rien n’est noir, et l’on peut faire preuve de fermeté et d’humanité”, a déclaré l’actuel ministre de la Santé Yannick Neudre le 3 septembre 2025 sur Europe 1. 

AME

Les ONG de santé scandalisées

Le projet de réforme du dispositif de l’AME a suscité de vifs critiques auprès des ONG de santé.

Dans un communiqué datant du 3 septembre 2025, l’Association française de lutte contre le VIH et les hépatites virales (AIDES) le qualifie d’un danger pour la santé publique et la lutte contre le sida. L’association fustige le gouvernement de mettre en péril des décennies d’avancées en santé publique. 

L’ONG Women for Women France dit WFWF explique que ce projet “oblige des centaines de milliers de femmes en France à demander l’autorisation de leur conjoint – leur agresseur – pour se soigner”.

De son côté, France Assos Santé déplore la tentative de faire passer des projets de décrets visant à durcir les conditions d’accès et le panier de soins de l’AME dans un délai d’urgence. 

Malgré la chute de François Bayrou, ce projet de décret fragilise davantage l’aide médicale d’État dont une partie de la classe politique souhaite supprimer. Or, Médecins du monde souligne que le niveau de prestations sociales d’un pays n’en fait pas un critère de choix de destination pour les personnes migrantes. D’ailleurs, l’ONG souligne que 35% des sans-papiers n’ont pas accès à l’AME même après plus de 5 ans de résidence sur le territoire français.

FAQ

Il s’agit d’un dispositif permettant aux ressortissants étrangers en situation irrégulière d’accéder aux soins, sous conditions de résidence et de ressources.

Une pièce d’identité valide avec photo est désormais requis pour demander l’AME.

Les revenus financiers du conjoint ou de la conjointe seront évalués en plus de ceux du/de la demandeur(-se).

Les soins exclus du panier de l’AME sont : 

  • la balnéothérapie,
  • les lunettes,
  • les soins prothétiques dentaires, 
  • certains actes de masso-kinésithérapie
  • et les transports sanitaires pour des soins programmés et non urgents en ville. 

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